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L’ennui au travail et la disposition à l’ennui chez les marins : différence entre officiers et personnels d’exécution.
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Publié dans : Archives des maladies professionnelles et de l'environnement, vol. 76, n° 1, février 2015, pp. 3-10, ill., bibliogr.
L’ennui au travail et ses conséquences sont très peu étudiés en France. Des situations professionnelles sont néanmoins propices au développement de l’ennui, du fait de leur monotonie. C’est le cas, en particulier, des marins de la marine marchande, dont le risque est augmenté par le fait qu’ils vivent à bord dans un huis clos. Dans ce contexte, le but de cette étude est de savoir s’il est possible de détecter les sujets susceptibles de présenter une prédisposition à l’ennui afin de les prendre en charge. La version française validée du questionnaire Boredom Proneness Scale (BPS) de Farmer et Sundberg a été soumise à des marins français, officiers et hommes d’équipage et à des témoins sédentaires de la même compagnie. Parallèlement, un test Hospital Anxiety and Depression (HAD) de Zigmond et Snaith leur a également été proposé. Le travail a concerné 79 marins (40 officiers et 39 hommes d’équipage) et 39 témoins. Les résultats des scores du BPS sont équivalents entre les marins et les témoins (9,2 ± 5), mais montrent une tendance (non significative) à une situation moins délétère chez les officiers que chez les hommes d’équipage (personnel d’exécution) : 8,4 ± 5 pour les officiers et 10,2 ± 4 pour les hommes d’équipage. Ces résultats sont très fortement corrélés à ceux de la dépression chez les officiers (r = 0,85), alors qu’ils ne le sont pas pour les hommes d’équipage (r = 0,54). En conclusion, le test BPS paraît être influencé par les conditions de travail des différentes catégories de personnels. Ceci est clairement montré pour les hommes d’équipage qui présentent des conditions de travail monotones, susceptibles de perturber le BPS dans le sens d’une disposition à l’ennui plus grande que chez les officiers. En revanche, les résultats des officiers confirment une forte relation avec l’état de dépression. Dans tous les cas, un mauvais score au BPS implique une dégradation des conditions de vie et de travail (fatigue, nervosité, inoccupation, solitude, pessimisme et désespoir), terrain propice à l’apparition d’addictions dont on connaît l’importance dans le milieu maritime. L’étude de la disposition à l’ennui apparaît comme un outil intéressant dans la détermination de l’aptitude à l’embarquement et dans la prise en compte de l’amélioration des conditions de vie et de travail à bord des navires actuels.