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Etude des agressions du personnel du Centre Hospitalier Universitaire de Clermont-Ferrand.
Article
Publié dans : Archives des maladies professionnelles, vol. 65, n° 7-8, décembre 2004, pp. 557-563, ill., bibliogr.
Il s'agit d'une enquête épidémiologique, descriptive et rétrospective, sur les agressions verbales et physiques déclarées comme accident du travail durant cinq années (de 1997 à 2001 inclus) au sein du CHU de Clermont-Ferrand. Les objectifs étaient : de mesurer l'incidence des agressions physiques et psychiques à l'encontre du personnel ; d'identifier les principales caractéristiques de l'agent hospitalier agressé et de l'agresseur ; d'évaluer les conséquences des agressions sur la santé et sur l'activité professionnelle de l'agent hospitalier ; d'apprécier la qualité de la prise en charge des victimes. Le recueil des données s'est fait à partir des fiches de déclaration des accidents de travail (AT), des dossiers médicaux et d'un questionnaire auto-administrable comportant notamment des questions sur la nature et la fréquence des agressions passées. 137 AT par agression ont été recensés et étudiés. Cent vingt-trois questionnaires ont été envoyés et 47 victimes ont répondu. Les données ont été saisies et analysées à l'aide du logiciel Epi info, version 6. Sur la période étudiée, les 137 AT correspondaient à 4,3 % du total des AT déclarés et aucune tendance à l'augmentation ou à la diminution n'a été observée. Les services les plus concernés étaient : les urgences (69/137, 50,3 %), la psychiatrie (24/137, 17,5 %) et la gériatrie (22/137, 16 %). Les agressions observées étaient physiques dans 88,4 % des cas, psychiques dans 8 %, et une association des deux dans 3,6 %. La majorité des 47 agents ayant répondu au questionnaire ont subi des cris, des insultes de façon quotidienne ou hebdomadaire, et des menaces verbales, avec gestes, avec objet au moins une fois par an. Ils ont été confrontés au moins une fois dans leur carrière à des coups avec objet. L'agresseur était le plus souvent un patient (120/137, 87,6 %) et un homme (95/137, 69,4 %). Les principales situations d'agression étaient : le contact avec un patient agité (66,4 %), un refus de soins (13,8 %), le contact avec un patient psychiatrique (12,4 %) et avec un patient alcoolique ou toxicomaniaque (10,9 %). La victime était dans la majorité des cas une femme (78/137), mais, en rapportant le nombre de victimes selon le sexe à l'effectif total des hommes et des femmes travaillant au CHU, on a pu constater que les hommes étaient plus concernés par la violence avec un sex-ratio H/F = 1,7. La victime appartenait le plus souvent à la tranche d'ancienneté la plus faible, et c'était les infirmiers qui étaient les plus exposés au risque. La nature des lésions physiques était variable. Elles siègeaient dans la majorité des cas au niveau des membres supérieurs (59,1 %) et de la tête (33,5 %). Parmi les 47 victimes qui ont répondu au questionnaire, 30 signalaient l'installation de troubles psychologiques à la suite de l'accident, avec pour certains des symptômes évoquant un état de stress post-traumatique. A long terme, un sentiment d'insécurité était signalé par la majorité. Vingt et un AT ont entraîné un arrêt de travail (21/137, 15,3 %). Vingt-huit victimes ayant répondu au questionnaire ont jugé correcte la prise en charge médico-légale des agressions, mais 19 l'ont jugée insuffisante. La formation sur la violence et l'agressivité a été jugée nécessaire mais insuffisante pour la plupart. En conclusion, l'incidence, les caractéristiques des victimes, des agressions et des situations sont voisines de ce qui a été déjà observé dans d'autres hôpitaux, en particulier en France. Le risque d'agression pour le personnel hospitalier du CHU de Clermont-Ferrand semble peu élevé par rapport aux autres causes d'AT. Cependant, les conséquences ne sont sûrement pas négligeables pour les victimes et pour l'hôpital. En outre il existe probablement une sous-estimation du nombre des agressions autres que physiques par la méthode d'étude des dossiers de déclarations d'AT. La mise en place d'actions de prévention et une prise en charge précoce et plus longue des victimes paraissent nécessaires, par une unité spécialisée associant, en particulier, des spécialistes en victimologie et en santé au travail.