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La multiplication des services de livraison à vélo et les problèmes de santé et de sécurité des cyclistes commerciaux. Elaboration de bonnes pratiques.
Etude et rapport | R-1098
Edition : Montréal (Canada), Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST), 2020, 89 p., ill., bibliogr.
Les objectifs du projet étaient d’étudier la croissance de la pratique des métiers à vélo et les formes d’organisation du travail mises en place ; d’approfondir la compréhension des risques routiers associés au travail à vélo ainsi que d’identifier les différents facteurs de risque pouvant mener à des accidents. Les cas d’accidents de travailleurs à vélo, leurs circonstances et les situations d’insécurité (quasi-accidents) vécues sont aussi explorés. Ces informations devraient permettre de mettre en place des mesures de prévention des accidents routiers liés à ces métiers, d’identifier de bonnes pratiques ainsi que d’envisager comment encadrer et améliorer les conditions de travail. Trente-six entretiens auprès de cyclistes commerciaux (22), d’employeurs (6) et d’entrepreneurs (8) de la région de Montréal, ont permis d’élaborer un cadre pour identifier les facteurs de risque de quasi-collisions, de collisions et de blessures encourus par différents types de cyclistes commerciaux. Le cadre présente les 21 caractéristiques et les traits individuels (expérience, comportement à risque), les types de tâches, les conditions de travail, les niveaux d’exposition et les facteurs externes qui influent sur la santé et la sécurité de ces travailleurs. Les entrevues ont permis de constater qu’ils ont tous leurs propres antécédents de développement d’aptitudes et jouissent de diverses conditions de travail ; ils utilisent des types de vélos et des équipements différents et sont ainsi exposés à des niveaux de risque distincts et variables. Ces risques varient en fonction de divers aspects du travail. L’expérience des cyclistes et la promotion de pratiques sécuritaires par les employeurs sont des facteurs clés de protection, mais la structure de rémunération est peut-être l’élément le plus susceptible d’influencer la sécurité des travailleurs. De même, les parcours dans les quartiers d’affaires bondés en période de pointe présentent aussi des risques élevés de blessures. La question de la santé personnelle, dont les problèmes liés à une alimentation adéquate, et ceux associés à l’usure chronique ont aussi émergé comme une préoccupation fréquente de ces travailleurs à haute consommation énergétique. Selon les résultats de l’enquête sur 228 participants, ce travail est la seule source de revenu de 44 % des travailleurs (58 % des messagers). L’échantillon est composé largement de travailleurs autonomes. Très peu de messagers et « autres » travailleurs (une catégorie regroupant plusieurs services professionnels ainsi que de petits entrepreneurs) sont syndiqués (9,4 et 6,2 %). Aucune forme de syndicalisation n’existe dans la livraison de nourriture. Les salaires sont généralement versés sous forme de commission (53,8 %). C’est respectivement 59 % et 56,5 % des livreurs et des messagers qui ne possèdent aucune forme d’assurance accident. Bien que les ecchymoses soient les blessures les plus fréquemment mentionnées, 26 des 208 répondants ayant répondu à cette question déclarent avoir eu un membre fracturé et 18 ont eu besoin de points de suture depuis qu’ils ont commencé ce travail. Le recours à une ambulance a été nécessaire 25 fois, et 40 de ces participants déclarent avoir subi un arrêt de travail. Dans le mois précédant l’enquête, c’est près de 42 % des répondants qui rapportent une blessure (généralement des entorses, brûlures, ecchymoses et inflammations). Les accidents sont majoritairement causés par l’état de la chaussée et par le comportement des autres. Les participants déclarent que leur inattention et les emportiérages sont aussi des causes fréquentes d’incident ou d’accident. C’est presque 20 % des travailleurs qui n’utilisent jamais ou presque jamais un casque, contre moins de 70 % qui déclarent toujours le porter. Si porter un casque ne contraint que très peu l’utilisateur, faire un détour pour voyager de façon plus sécuritaire peut sembler plus contraignant et ralentir l’enchaînement des activités (et donc souvent le salaire). Seuls 28,5 % des travailleurs acceptent cette déviation ; ce taux est considérablement plus faible chez les messagers. La durée des quarts de travail des participants au protocole GPS variait entre 2 et 9 heures. Ils parcouraient en moyenne 30 kilomètres par jour et effectuaient entre 8 et 41 arrêts dont la moitié des arrêts avaient lieu lors de livraisons. Les vitesses moyennes pratiquées lors des trajets étaient de 16,6 km/h, la distance des trajets était en moyenne de 1,8 km (temps moyen 7 minutes) et les arrêts duraient en moyenne 10 minutes. Généralement, les cyclistes de cet échantillon consacraient 36 % de leur quart de travail à circuler sur les routes et à être exposés à des risques pour leur sécurité. Etant donné que l’utilisation du vélo comme outil de travail augmentera probablement avec le temps, il est important de comprendre comment l’organisation du travail, la réglementation du secteur et la sensibilisation des travailleurs et des employeurs peuvent réduire les risques encourus par les cyclistes commerciaux. La dissémination de bonnes pratiques permettant de réduire la charge d’accidents liés à ce type d’emploi, une réglementation du secteur et l’adoption de normes de sécurité et des infrastructures routières tenant en compte ce type de cyclistes semblent nécessaires pour favoriser l’essor de saines pratiques de cyclisme commercial.
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