La relation dose-effet et l'estimation des effets cancérogènes des faibles doses de rayonnements ionisants. Rapport conjoint n° 2. 30 mars 2005.


Etude et rapport

TUBIANA M. | AURENGO A. | AVERBECK D. | BONNIN A. | ET COLL.

Edition : Editions Nucléon (Immeuble Platon, Parc des Algorithmes, 91194 Gif-sur-Yvette), 2005, 168 p., ill., bibliogr.


Les risques cancérogènes d'une exposition aux rayonnements ionisants ont été estimés par de nombreuses études épidémiologiques entre 0,2 et 5 Sv. Mais le domaine des doses qui concerne la santé humaine est généralement beaucoup plus faible : les doses délivrées par la plupart des examens radiologiques sont inférieures à une dizaine de mSv. Les irradiations auxquelles sont exposés les travailleurs, ou les personnes habitant les régions où l'irradiation naturelle est élevée sont également de cet ordre ou légèrement supérieures. Or, les études épidémiologiques disponibles ne décèlent aucun effet pour des doses inférieures à 100 mSv, soit qu'il n'en existe pas, soit que la puissance statistique des enquêtes ait été insuffisante pour les détecter. Comme certaines enquêtes portent sur un grand nombre de sujets, ces résultats montrent déjà que le risque, s'il existe, devrait être très faible. Les méthodes d'évaluation directe étant insuffisantes, on est contraint pour estimer les risques éventuels des faibles doses (< 100 mSv) d'extrapoler à partir des effets cancérogènes observés entre 0,2 et 3 Sv. Une relation linéaire décrit convenablement la relation entre la dose et l'effet cancérogène pour les doses supérieures à 200 mSv où on a pu la tester. Ceci a paru justifier l'utilisation d'une relation linéaire sans seuil (RLSS) pour estimer le risque des faibles doses. Le présent rapport émet des réserves sur l'usage de la RLSS pour évaluer le risque cancérogène des faibles doses (< 100 mSv). La RLSS peut constituer un outil pragmatique utile pour fixer les règles de la radioprotection pour des doses supérieures à une dizaine de mSv ; mais, n'étant pas fondée sur des concepts biologiques correspondant à nos connaissances actuelles, elle ne peut pas être utilisée sans précaution pour estimer par extrapolation l'effet des faibles et surtout des très faibles doses (< 10 mSv), notamment dans l'évaluation du rapport bénéfice-risque, imposée au praticien dans le cadre de la pratique radiologique par la directive européenne 97-43. Les mécanismes biologiques sont différents pour des doses inférieures à quelques dizaines de mSv et pour des doses supérieures. Les risques éventuels dans la gamme de dose des examens radiologiques (0,1 à 5 mSv ; jusqu'à 20 mSv pour certains examens) doivent être estimés en tenant compte des données radiobiologiques et de l'expérimentation animale. L'usage d'une relation empirique qui n'est validée que pour des doses supérieures à 200 mSv pourrait, en surévaluant les risques, faire renoncer à des examens susceptibles d'apporter au malade des informations utiles ; elle pourrait aussi en radioprotection conduire à des conclusions erronées. Les décideurs confrontés au problème des déchets radioactifs ou au risque de contamination doivent réexaminer la méthodologie utilisée pour évaluer les risques des très faibles doses et des doses délivrées avec un très faible débit. Enfin, ce rapport confirme qu'il n'est pas acceptable d'utiliser le concept de dose collective pour évaluer les risques liés à l'irradiation d'une population.

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